Le télétravail est-il fait pour vous?

Si l’implantation du télétravail a été rapide et relativement facile pour certaines entreprises, elle a été plus difficile, voire impossible pour d’autres. L’effort n’est pas le même en fonction de l’activité et des mesures nécessaires pour le déploiement du télétravail.

Des tâches faisables à distance?

En mars dernier, 57 % des employés ont commencé à travailler de la maison. En mai, 32,6 % des entreprises au Canada avaient au moins 10 % de leurs effectifs en télétravail, selon une enquête de Statistique Canada.

Le phénomène se révèle positif puisque 88 % des travailleurs qui ont tenté le télétravail ont déclaré avoir apprécié l’expérience, selon un sondage de la firme Léger effectué en novembre 2020. De nombreuses entreprises ont déjà annoncé que la possibilité de faire du télétravail serait maintenue après la pandémie.

Cependant, toutes les entreprises n’ont pas pu adopter ce nouveau mode de travail, du moins pas de façon généralisée. « Cette pratique ne s’adapte pas à tous les secteurs économiques, explique François Vincent, vice-président, Québec à la Fédération canadienne de l’entreprise indépendante (FCEI). La majorité des PME québécoises (64 %) affirment ne pas l’avoir implantée parce que leur modèle d’affaires ne s’y prête tout simplement pas. Ce qui est logique : un garagiste ne peut pas changer des pneus et une coiffeuse ne peut pas couper les cheveux de ses clients à distance. »

Le Groupe V, qui propose un service de première ligne pour la livraison de colis et de courrier, compte une cinquantaine d’employés. « Pour les livreurs et les employés qui trient les colis, le télétravail est impossible. Chez nous, seuls 20 % des effectifs peuvent travailler de la maison », indique la propriétaire, Nathalie D’Aoust.

La firme de recherche Oxford Economics a cerné des secteurs pouvant difficilement cohabiter avec la distanciation, voire avec le télétravail, indique une étude du Conseil du patronat du Québec sur le télétravail. C’est notamment le cas des industries de la construction, de l’agriculture, du transport, du commerce de détail ou encore de l’hébergement-restauration, où moins de 20 % des travailleurs peuvent s’en remettre au télétravail. Dans l’ensemble, on estime qu’environ 60 % des emplois pourraient être adaptés au travail à distance.

Un budget minimal à y consacrer?

Selon les secteurs d’activité, les investissements ne sont pas tous de la même envergure. Par exemple, la TOHU a octroyé une prime à ses employés pour équiper leur bureau à la maison, rapporte Laure Cherrière, responsable des ressources humaines. Deuxième écran, chaise convenable, lumière, etc., les ergothérapeutes conseillent un certain nombre d’aménagements. La compagnie de diffusion des arts du cirque a souhaité accompagner ses travailleurs dans leurs efforts pour s’équiper correctement à la maison.

Pour d’autres entreprises, le passage au télétravail a engendré des coûts importants. « Les logiciels de gestion coûtent cher et on a dû changer nos systèmes informatiques pour se protéger des tentatives d’hameçonnage, sans oublier de souscrire à des assurances supplémentaires », témoigne Josée Dufour, présidente du Groupe Axiomatech, spécialisé dans la gestion du capital immobilier des entreprises dans les secteurs industriels, institutionnels et commerciaux.

Elle estime néanmoins que le télétravail a permis à son entreprise d’accélérer le virage informatique, gage de sa compétitivité future.

Êtes-vous prêts à vous adapter?

Le télétravail exige aussi une adaptation des façons de faire. Il nécessite une capacité à réinventer rapidement son activité : passer d’un salon physique à un événement 100 % virtuel, faire du cybercommerce au lieu d’ouvrir sa boutique. Ce sont des virages fondamentaux, qui demandent de l’agilité et une bonne gestion du changement.

Même quand l’activité reste sensiblement la même, les pratiques changent. « Le télétravail, c’est une nouvelle façon de gérer, d’échanger, qui impacte la culture d’entreprise », estime Julie Cantin, présidente et co-fondatrice d’Évoluo, un cabinet de services-conseils qui accompagne les entreprises dans la conduite du changement.

Après avoir concentré leurs efforts sur la mise en place des outils collaboratifs permettant le travail à domicile, ses clients se consacrent aujourd’hui à maintenir l’engagement et la mobilisation des équipes. « Ce qui manque, c’est l’énergie que l’on ressent en présence de nos collègues et la communication informelle, qui se nourrissent l’une l’autre », ajoute-t-elle. Il faut donc trouver de nouvelles méthodes pour compenser.

Les moyens de communication font aussi partie des points à réinventer. Parmi les PME ayant recours au télétravail, 36 % soulignent qu’il est moins facile qu’avant de communiquer avec les employés. « La communication est moins fluide en télétravail. On manque de réactivité », constate Axel Kalbarczyk, président de Rise Kombucha, qui produit la boisson du même nom. « Structurer le travail autour de meetings virtuels entraîne un manque de créativité. On ne fait pas de résolution de problèmes à heures fixes! »

Toutefois, les rencontres virtuelles avec divers outils de prise de notes collaborative peuvent facilement être organisées au pied levé pour « brainstormer, faire le point sur un dossier, aider un employé à résoudre une difficulté ou suivre le moral de l’équipe ».

Un équilibre propre à chaque entreprise

Selon une étude menée par l’Université de Montréal, un tiers des travailleurs estiment que leur productivité a augmenté depuis qu’ils doivent travailler à distance. Toutefois, les personnes qui se sentent isolées ou dont les tâches dépendent des autres perçoivent une baisse dans leur productivité.

« Avec le télétravail à 100 %, on rencontrait des enjeux de motivation et d’efficacité », reconnaît Nathalie D’Aoust. Sa solution : une formule hybride. « Avec trois jours de travail à domicile et deux jours au bureau, on conjugue bien-être des employés et productivité », observe-t-elle.

Julie Cantin estime également que l’avenir se fera en mode hybride. « Les entreprises vont devoir structurer davantage leur organisation », affirme-t-elle. La répartition entre travail au bureau et à domicile pourra correspondre à un nombre de jours hebdomadaire ou dépendra des tâches à réaliser. « L’important, c’est de rester cohérent avec sa culture, car on attire des gens qui vont correspondre à nos valeurs, et de rester ouverts. Il faut se donner le droit à l’erreur! », conclut-elle.

Force est de constater que le télétravail, qu’il soit une évidence pour votre entreprise ou encore un défi majeur, qu’il se fasse dans le cadre d’une politique d’attractivité ou par souci de rétention du personnel, est devenu incontournable.

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