Télétravail : comment lutter contre la réunionite?
Par Caroline Bourbeau, membre de l’équipe Services-Conseils RH du Conseil du patronat du Québec (CPQ)
Plus d’un an après le début de la pandémie, les gestionnaires et les employés en télétravail montrent des signes de fatigue :
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- Les capacités d’adaptation sont fortement sollicitées;
- La charge de travail est lourde;
- La pression est élevée;
- Et tous s’affairent à répondre avec professionnalisme aux demandes des clients, de la direction et des collègues malgré un environnement changeant et incertain.
Que ce soit pour se maintenir à jour, pour garder le cap, pour faire des suivis ou pour socialiser, les rencontres virtuelles se sont multipliées.
« Prochaine rencontre dans 15 minutes »…
Considérée par plusieurs comme un fléau des temps modernes, la réunionite a vu dans le télétravail un terreau fertile pour se développer encore davantage.
Gestionnaires et employés, confinés à la maison et captifs de leurs écrans pour travailler, voilà l’ingrédient qu’il faut pour créer l’illusion d’une constante disponibilité.
Pour le gestionnaire bienveillant et de proximité qui cherche à soutenir et accompagner les membres de son équipe tout en étant impliqué dans les décisions de gestion, chaque créneau horaire disponible dans son agenda partagé devient une opportunité pour une nouvelle invitation à un Zoom, un Teams, ou un Google Meet.
Et ainsi s’enchaînent les réunions à quelques secondes d’intervalle jour après jour, semaine après semaine. Depuis le début de la pandémie, la plateforme de visioconférence de Microsoft à elle seule a enregistré une croissance de 1 000 % de l’utilisation de son outil Teams.
Concentration et attention
Physiquement, nos corps sont aisément capables d’assister à toutes ces réunions, et ce, sans grande préparation, mais… nos cerveaux ne le sont pas. La concentration et l’attention ne se commandent pas par la simple pression du bouton « rejoindre la rencontre ».
Nos pensées sont encore focalisées sur la rencontre précédente, alors que notre attention devrait se porter sur nos nouveaux interlocuteurs. En enchaînant les rencontres, nous entravons l’assimilation des informations fournies ou discutées et l’élaboration cognitive des actions à poser pour y donner suite.
De plus, on se prive d’une nécessaire période de récupération assurant le bon niveau de concentration pour la rencontre suivante. Selon les études, il faut entre 2 et 24 minutes entre deux tâches pour atteindre un niveau de concentration productif!
Communications par écran interposé, perception d’évitement et surstimulation
En mode virtuel, les rencontres nécessitent un niveau de concentration plus élevé. En plus de nous concentrer sur le contenu de la rencontre, nous sommes inconsciemment à la recherche de signaux de communication.
Certaines informations sont accessibles si la rencontre se déroule sans problèmes techniques :
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- le ton de la voix,
- le débit de parole,
- et les intonations.
Mais les informations non verbales de la communication sont grandement atténuées. De plus, le mode de visualisation multiparticipant nous incite à scruter constamment l’écran à la recherche de micromouvements faciaux qui nous permettent de comprendre des éléments ou de déduire l’adhésion des autres participants sans qu’ils aient besoin d’être énoncés verbalement.
L’absence de contact visuel direct induit une perception d’évitement. Celle-ci peut générer l’impression que les participants à la réunion sont sur la défensive ou inattentifs. En conséquence, le présentateur a tendance à redoubler d’ardeur pour stimuler les participants.
Nous ne nous sommes jamais autant regardés que depuis que nous télétravaillons et que la vidéoconférence fait partie de notre quotidien. L’effet cinéma, c’est-à-dire le fait d’être conscient que les autres nous voient et même de ce qu’ils voient, crée une double tâche cérébrale consistant à focaliser notre attention sur les interlocuteurs virtuels et sur nous-mêmes.
Ce miroir constant génère une anxiété et une pression sociale accrues. Notre cerveau ne cesse de multiplier les zones d’attention. Par conséquent, il n’est pas surprenant que la fatigue se fasse sentir à la fin de la journée!
Des conseils pour éviter la réunionite en télétravail
En entreprise, les réunions sont essentielles pour fonctionner, évoluer, partager, créer et mobiliser. Mais, encore faut-il qu’elles soient efficaces et qu’elles tiennent compte de la véritable réalité dans laquelle se trouvent les participants.
Les pratiques reconnues en gestion des réunions efficaces ont toujours leur place en format virtuel, mais quelques ajustements pourraient être bénéfiques :
Déterminez au préalable le type de rencontre et son objectif : rencontre de remue-méninges, d’information, de discussion, de suivi de projet… afin de choisir les participants et le meilleur mode de communication. Afin que chacun se prépare en conséquence, les participants doivent savoir :
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- pourquoi ils sont présents à cette rencontre,
- quelle est la contribution attendue de leur part.
En mode virtuel, les rencontres plus courtes portant sur peu de sujets à la fois sont à préconiser.
Dressez un ordre du jour précisant le temps alloué par sujet. Les participants et l’animateur pourront ainsi se préparer à la rencontre et concentrer les discussions sur les sujets établis.
Allouez une période d’interaction libre afin de permettre un moment pour socialiser, prévoir une activité brise-glace, une minute de silence ou mettre une musique en fond sonore permet une période de transition.
Certaines organisations ont choisi de troquer les réunions classiques de 13 h 30 ou 14 h pour des rencontres à 13 h 15 ou 13 h 45. Mais celles-ci se terminent à la demi-heure ou à l’heure, afin de laisser 15 minutes entre les réunions. Cela permet une période d’assimilation de l’information et un temps de récupération en vue d’une nouvelle période de concentration à la réunion suivante.
Les réunions virtuelles debout sont aussi populaires selon le type de sujet abordé, car elles permettent de combiner l’activité physique et intellectuelle tout en limitant la durée de la rencontre.
Réduisez les distractions en éteignant la sonnerie du téléphone et en désactivant les notifications de courriels entrants. Pour concentrer votre attention sur le sujet ou la présentation, certains experts suggèrent d’éteindre votre caméra afin de rester concentré sur le contenu technique et de l’allumer lorsque vient le moment de parler.
Il est également suggéré d’amplifier les réactions non verbales pour faciliter la compréhension des signaux de communication. À titre d’exemple, vous pouvez :
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- hocher la tête,
- sourire,
- montrer un pouce en haut ou en bas pour énoncer son opinion,
- lever la main pour demander le droit de parole, etc.
Diversifiez les moyens de communication selon les sujets abordés et l’information à obtenir.
Toutes les communications ne requièrent pas une réunion virtuelle. De nombreux outils existent pour partager de l’information ou solliciter des avis :
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- un court sondage d’opinion,
- les outils informatiques collaboratifs de suivi de projets,
- les réunions en marchant (walking reunions),
- le courriel en précisant l’action attendue dans le titre,
- le clavardage pour les communications rapides synchrones, le téléphone, etc.
Et vous, quelles sont vos astuces pour éviter les pièges de la réunionite aiguë?
Vous avez besoin d’un soutien personnalisé pour l’optimisation des pratiques de gestion en télétravail ou pour l’implantation du télétravail? Contactez l’équipe Services-Conseils RH du Conseil du patronat du Québec à l’adresse psrh@cpq.qc.ca
Une rencontre exploratoire de 30 minutes est offerte gratuitement!
Texte inspiré de :
- Pourquoi la visioconférence met-elle notre cerveau K.-O. (et comment riposter) ?, un article d’Alice Galopin pour France Télévisions
- ‘Zoom fatigue’ is taxing the brain. Here’s why that happens., un article de Julia Sklar dans le National Geographic.
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