Changez de regard sur le déséquilibre du marché du travail

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31 mars 2023

Frédéric Lalande s’est joint à l’équipe du CPQ en 2022. Diplômé de premier cycle en science politique, il possède plus d’une dizaine d’années d’expérience en représentation politique, en soutien à la concertation, en développement de projets et en développement de la main-d’œuvre. Son leadership a été reconnu par ses homologues, puisqu’il a également été président du Comité sectoriel de main-d’œuvre de l’économie sociale et de l’action communautaire et du Chantier de l’économie sociale.

Le retour à la situation de plein emploi au Québec est bel et bien confirmé. Les emplois perdus au cours de la pandémie ont tous été récupérés. Cela dit, un déséquilibre entre l’offre et la demande de main-d’œuvre persiste. Le départ à la retraite des baby-boomers combiné à la stagnation de la population en âge de travailler fait en sorte que la pénurie de main-d’œuvre continue de sévir. D’après les prévisions de l’ISQ et à moins d’un important ralentissement économique, cette situation perdurera jusqu’en 2066, explique Frédéric Lalande, directeur – Stratégie et qualification de la main-d’œuvre du CPQ.

Déséquilibre généralisé à travers la province

Selon le rapport État d’équilibre du marché à court et moyen termes (édition 2022) du ministère de l’Emploi et de la Solidarité sociale (MESS), la main-d’œuvre des prochaines années sera constituée de jeunes qui terminent leurs études (50 %), d’immigrant∙e∙s (24 %), de personnes en âge de retraite qui continuent de travailler (8 %), de jeunes qui s’activent sur le marché du travail plus tôt dans leurs parcours de vie (16 %) et de la baisse du taux de chômage (2 %).

À l’échelle du Québec, pour la période de 2022 à 2031, l’analyse du MESS conclut que :

  • 51 professions seront en déficit de main-d’œuvre;
  • 183 professions seront en léger déficit;
  • 176 professions seront en équilibre;
  • Aucune profession ne sera en surplus (mais 11 en léger surplus).

M. Lalande précise que « la situation sera vécue très différemment en fonction des régions. Alors qu’une même profession est en équilibre à Montréal, elle peut être en déficit en Abitibi. Le choix du lieu de résidence pour les personnes issues de l’immigration, plus souvent en ville, est un des éléments qui explique cette disparité. »

Causes des difficultés de recrutement des entreprises

Le rapport du Ministère est clair : ce n’est pas parce qu’une profession est en position d’équilibre que les entreprises concernées ne sont pas confrontées à des défis de recrutement.

En effet, des difficultés de recrutement ont été rapportées pour :

  • 72 % des professions en déficit ou léger déficit;
  • 51 % des professions en équilibre;
  • 45 % des professions en léger surplus;
  • 20 % des professions sans diagnostic.

Les deux principales causes évoquées pour expliquer les difficultés de recrutement, et ce, peu importe le niveau de compétence, sont les conditions de travail autres que le salaire et la perception négative de la profession. M. Lalande prend l’exemple du domaine de la construction pour expliquer ce dernier point.

« Construire des maisons et des routes, c’est bien vu. Cela dit, il reste encore beaucoup de préjugés à l’égard du milieu qui font que certains groupes de la population, les femmes, par exemple, ne s’y avancent pas. »

Comprendre les besoins de la main-d’œuvre pour s’adapter

Alors que la situation est très avantageuse pour les demandeur∙euse∙s d’emploi, les gestionnaires de PME sont à la recherche de solutions pour favoriser le recrutement.

« Il faut faire une analyse des compétences exigées pour nos postes à combler et se demander si nos exigences à l’entrée sont parfois trop importantes par rapport à notre réel besoin, explique M. Lalande. Souvent, on va mettre le secondaire cinq comme une base, mais ça peut représenter une barrière à l’entrée pour beaucoup de monde. »

En ce qui concerne les conditions de travail, il y a plusieurs mesures qui ne coûtent rien que l’on peut mettre en œuvre. « La flexibilité en ce qui concerne les horaires et le lieu de travail, l’aménagement du temps de travail, la conciliation travail-famille est un bon exemple de mesures qui, oui, ont un impact sur l’organisation du travail et qui requièrent un effort de la part de l’entreprise, mais qui peuvent produire de beaux résultats, » poursuit M. Lalande.

« S’intéresser au potentiel du bassin démographique de sa région et de ses effectifs peut aussi créer des occasions intéressantes », explique M. Lalande.

À l’externe, les gestionnaires devraient se renseigner sur la composition du bassin de main-d’œuvre potentielle : « Est-ce que j’ai des personnes immigrantes? Est-ce que j’ai des jeunes? Est-ce que j’ai des personnes autochtones? ». À l’interne, ils devraient se questionner sur leurs employé∙e∙s : « Est-ce que j’ai des gens dont j’exploite mal les compétences et les talents? Est-ce qu’il y a quelqu’un qui aimerait se développer dans mon entreprise? » En combinant les réponses à ces questions, les entreprises pourront mieux ajuster leur demande au marché tout en fidélisant leurs talents.

La technologie comme solution de repli?

Enfin, les entreprises doivent réfléchir à leurs activités fondamentales et se questionner sur la nécessité de certains emplois. Des postes moins intéressants et pour lesquels la tâche est répétitive et difficile gagneraient à être remplacés par une forme de robotisation.

Alors que les coûts liés à l’implantation de ce type de solution sont plus élevés, M. Lalande suggère de les voir comme un investissement et de tenir compte des gains de productivité possibles « parce que la situation actuelle de la main-d’œuvre ne changera pas de sitôt. »

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