Comment garantir l’équité salariale en télétravail et en présentiel

Les modes de travail ont grandement évolué au cours des deux dernières années. Même s’il s’agit d’une obligation légale pour bon nombre d’employeurs, il peut être plus difficile de garantir l’équité salariale à ses salariés dans ce nouveau contexte. Me Carl Trudeau, avocat senior au cabinet Norton Rose Fulbright, nous éclaire sur la manière d’y arriver.

Le 21 novembre 1996, la Loi sur l’équité salariale est adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale du Québec. La nouvelle loi a pour but de « corriger les écarts salariaux dus à la discrimination systémique fondée sur le sexe à l’égard des personnes qui occupent des emplois dans des catégories d’emplois à prédominance féminine ».

À partir du 1er janvier 1997, toute entreprise comptant 10 salariés ou plus se voit dans l’obligation de se conformer à la loi. De plus, « tout employeur dont l’entreprise compte 50 salariés ou plus doit établir, conformément à la présente loi, un programme d’équité salariale applicable à l’ensemble de son entreprise  ».

Graduellement au fil des années, l’iniquité régresse. Si bien qu’en 2020, le Québec affichait un écart salarial entre les femmes et les hommes de 8,1 %, comparativement à 15,8 % en 1997, pour un salaire horaire moyen.

Le processus d’équité

Ainsi, depuis 25 ans déjà, les employeurs assujettis à la loi doivent procéder à des travaux d’équité salariale. Pour ce faire, ils doivent cerner et comparer les catégories d’emplois à prédominance féminine et masculine et apporter les correctifs nécessaires pour éliminer les écarts salariaux relevés, si tel est le cas.

Mais depuis 2019, la Loi sur l’équité salariale a subi des modifications.

« Entre autres modifications, certaines entreprises doivent désormais mener un processus de participation, dans le cadre de leur évaluation de maintien de l’équité salariale. Le processus de participation consiste essentiellement à transmettre des renseignements sur les travaux d’équité salariale et de permettre aux syndicats et aux salariés de poser des questions, de présenter des observations, des suggestions, etc. Le processus de participation s’applique aux employeurs qui ont mis en place un comité d’équité salariale pour l’exercice initial, mais qui décident de procéder seuls à l’évaluation de maintien. Il en va de même pour les employeurs qui comptent au moins une association accréditée (syndicat), mais qui procèdent seuls à l’évaluation en question », explique MTrudeau.

Les écueils à éviter lors du processus et de l’évaluation

Au-delà de cet ajout, les modes d’organisation du travail ont aussi beaucoup changé au cours des deux dernières années. À un point tel que le télétravail et le mode de travail hybride sont presque devenus la norme.

À lui seul, ce « nouvel » élément peut compliquer le processus de participation, mais il ne le rend pas pour autant impossible. Comme le mentionne Me Trudeau, les entreprises doivent s’adapter.

« À titre d’exemple, le processus de participation devrait être mené par des moyens technologiques, et ce, afin que les salariés et les syndicats aient l’occasion de manifester leurs commentaires adéquatement. Les entreprises peuvent ainsi procéder par courriel. Mais, elles pourraient également envisager une séance de consultation virtuelle. Également, les affichages des résultats devraient être communiqués par courriel, et ce, afin d’assurer la bonne réception par l’ensemble des parties intéressées et de leur permettre de présenter des demandes de renseignements additionnelles ou de nouvelles observations ».

En ce qui a trait à l’exercice d’équité salariale, le télétravail ou le travail en mode hybride devront effectivement être pris en considération.

« Les entreprises devront se questionner s’il en découle des changements sur le plan des conditions dans lesquelles le travail est effectué. À ce chapitre, sur son site Web, la CNESST explique que ce critère concerne “le niveau d’inconvénients physiques et psychologiques associés à l’environnement de travail” (par exemple : chaleur, bruit, contacts humains difficiles, etc.) », indique le juriste.

Mais selon Me Trudeau, le télétravail ne devrait pas vraiment affecter les évaluations d’emploi, notamment parce qu’il s’agit généralement de postes de bureau. Toutefois, l’avocat rappelle que « chaque cas demeure un cas d’espèce ».

En somme, le télétravail ou le mode de travail hybride va inévitablement forcer les entreprises à apporter des ajustements sur la manière de mener l’exercice et l’évaluation d’équité salariale, si elles veulent remplir leurs obligations légales adéquatement. Cependant, ces modes d’organisation du travail risquent fort de n’avoir que peu ou pas du tout d’incidence sur les résultats du processus.

 

Envie d’en apprendre plus et de mieux comprendre les exigences de la Loi sur l’équité salariale? À l’occasion du 25e anniversaire de son adoption, la CNESST tiendra, le 8 mars prochain, un panel virtuel intitulé : 25 ans d’équité salariale : bilan et défis. Lors de l’événement, des experts et expertes échangeront, notamment sur les facteurs qui perpétuent l’iniquité salariale et sur l’évolution du marché du travail.

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