Télétravail : une solution inclusive pour les personnes en situation de handicap

Directrice du ROSEPH (Regroupement des Organismes Spécialisés pour l’Emploi des Personnes Handicapées) et Présidente du Comité Consultatif Personnes Handicapées chez CCPH Québec

La pandémie a bouleversé les milieux professionnels, notamment par la généralisation du télétravail. Mais ce changement drastique a peut-être contribué à instaurer de nouvelles méthodes de fonctionnement plus inclusives dans le milieu de travail.

L’année qui vient de s’écouler a certainement changé bien des choses dans le milieu professionnel. L’arrivée du télétravail notamment aura toutefois été bénéfique pour certains. Laurence Marin, directrice générale du Regroupement des organismes spécialisés pour l’emploi des personnes handicapées (ROSEPH) explique en quoi le télétravail s’est avéré un moyen de rendre certains milieux de travail plus inclusifs.

Q. Diriez-vous que la généralisation du télétravail a amélioré les occasions d’emplois pour les personnes en situation de handicap?

R. « Je dirais que oui dans certains cas. Par exemple, pour les personnes atteintes de déficiences motrices, il s’agit d’un gain réel, car elles n’ont pas à quitter leur domicile pour travailler. Les personnes atteintes de maladies évolutives ou qui souffrent de douleur chronique en bénéficient également. Il est certainement plus facile de gérer la fatigue lorsqu’on n’a pas à se déplacer.

En revanche, pour les personnes ayant des difficultés d’organisation et nécessitant un encadrement, que procure généralement le milieu de travail, la situation est plus difficile. Prenons l’exemple d’une personne qui présente un trouble du spectre autistique et qui doit, du jour au lendemain, être beaucoup plus autonome et s’organiser pour travailler à distance; il s’agit d’un défi de taille. Mais pour d’autres, cela leur a donné une plateforme pour intégrer enfin le marché du travail. »

Q. Comment le télétravail a-t-il contribué à l’inclusion des personnes en situation de handicap?

R.« En étant tous des télétravailleurs, tout le monde logeait ainsi à la même enseigne et cela a permis d’estomper un peu les différences. Par exemple, si une personne en situation de handicap ne peut pas se rendre au bureau à la même heure que tous les autres employés, en raison notamment d’un traitement ou de soins, cette situation peut être perçue comme un privilège et créer des frictions. Le télétravail offre une certaine autonomie en matière de gestion du temps et permet ainsi d’éviter une telle situation.

Par ailleurs, il est devenu pratique courante de mener une entrevue d’embauche à distance. Cette manière de procéder a aussi contribué à faire tomber des barrières et à éviter la stigmatisation de candidats. »

Q. Pensez-vous que ces nouvelles façons de faire demeureront en place après la pandémie?

R. « Je pense que certaines de ces pratiques demeureront en place. Elles sont utilisées depuis assez longtemps pour démontrer qu’il est possible de réaliser certaines activités à distance tout en obtenant les mêmes résultats, voire des résultats meilleurs. C’est certainement bénéfique. Nous avons aussi pu constater que le télétravail ne requiert aucun équipement complexe et qu’il est facile d’adapter un poste de travail, que la personne soit en situation de handicap ou non.

Toutefois, comme pour tous les travailleurs, les gestionnaires devront se pencher sur la problématique d’isolement. Si le télétravail constitue une solution plus facile pour certaines personnes en situation de handicap, il y aurait lieu d’envisager une formule hybride comprenant une à deux journées par semaine au bureau, notamment pour maintenir le sentiment d’appartenance et bénéficier des échanges en personne entre collègues. »

Créer des milieux de travail à distance plus inclusifs

Parfois, nul besoin de réaliser un audit exhaustif pour adapter adéquatement les postes de travail aux besoins des employés, et ce, qu’ils soient en situation de handicap ou non.

Une grande capacité d’écoute et d’ouverture face aux initiatives peut mener loin. Voici quelques recommandations de la Commission de la santé mentale du Canada pour créer des milieux de travail plus inclusifs :

  • Encourager les employés à présenter leurs idées à la direction et à donner leur avis sur les décisions;
  • Offrir des occasions de perfectionnement professionnel et d’avancement de carrière;
  • Faire le point régulièrement avec les employés pour s’assurer qu’ils obtiennent le soutien dont ils ont besoin, le cas échéant;
  • Concevoir et appuyer des initiatives de soutien par les pairs pour les personnes ayant des expériences communes.

En outre, les gouvernements fédéral et provincial ont aussi mis sur pied des programmes pour aider les entreprises à créer des milieux de travail plus inclusifs. Dans le cadre du programme Gestion de l’inclusion et de l’adoption, le gouvernement du Canada offre aux employeurs canadiens du financement et des conseils d’experts pour mettre en place les accommodements en milieu de travail.

Par ailleurs, le gouvernement provincial a aussi élaboré la Stratégie nationale pour l’intégration et le maintien en emploi des personnes handicapées, qui comprend différents programmes et ressources.

 

L’adaptation en chiffres
Selon des données de la Commission de la santé mentale du Canada1 :

— L’investissement pour la mise en œuvre de mesures visant à recruter et à conserver en poste des travailleurs vivant avec une maladie mentale se rentabilise de deux à sept fois en cinq ans.

— Cela se traduit par des économies de 56 000 $ à 210 000 $ par employé qui bénéficie de mesures d’adaptation sur une période de cinq ans.

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