La télémigration : un phénomène en pleine expansion

Vice-président et directeur général d’AURAY Sourcing International

Contacter cet expert

Sous l’impulsion du télétravail et des progrès technologiques, la télémigration devient une réalité de plus en plus présente dans le monde professionnel. Mais de quelle manière les entreprises peuvent-elles tirer le meilleur parti de cette tendance qui se traduit par le recrutement international d’une main-d’œuvre, les télémigrants, qui travaillera depuis un autre pays?

Qu’est-ce que la télémigration?

C’est dans un essai intitulé The Globotics Upheaval : Globalization, Robotics, and the Future of Work, publié en 2019, que Richard Baldwin, professeur d’économie internationale à l’Institut des hautes études internationales et du développement de Genève, a pour la première fois fait mention du terme « télémigration » pour désigner le fait « que des personnes établies dans un pays travaillent dans les bureaux d’un autre pays ».

Un phénomène de délocalisation qui, plutôt que de toucher la production de biens, s’applique dans ce cas aux cols blancs. Selon lui, différents facteurs favorisent la télémigration :

  • le télétravail domestique;
  • les plateformes de travail indépendant en ligne;
  • l’amélioration notable des services de traduction automatique;
  • les technologies de téléprésence.

Pour dresser un portrait plus détaillé du phénomène, nous avons fait appel à Wayne Tessier, vice-président et directeur général d’AURAY Sourcing International, une filiale de Raymond Chabot Grant Thornton spécialisée en immigration d’affaires, en recrutement et en mobilité internationale.

Selon lui, la télémigration se définirait comme « l’externalisation des processus, ou télétravail à l’international. C’est une ressource qui, à partir d’un autre pays, peut accomplir les mêmes tâches que si elle était au bureau physiquement. Le service rendu et sa qualité sont les mêmes, mais la personne [œuvre en mode] virtuel. »

Pourquoi le phénomène prend-il de l’ampleur?

Déjà bien plus présente qu’on aurait pu l’imaginer avant la pandémie, la télémigration « permet d’accéder à une main-d’œuvre qu’on pensait auparavant non accessible ou alors accessible seulement par l’immigration », poursuit Wayne Tessier.

Selon lui, tous les métiers qui se font en télétravail aujourd’hui pourraient s’effectuer de cette manière. Mais si on y recourt, c’est en général parce que la main-d’œuvre spécialisée qu’on recherche ne se trouve pas sur place. Celle-ci est d’ailleurs parfois si rare qu’il arrive que deux entreprises doivent se battre pour l’obtenir.

Ce mode de télétravail représente en outre une excellente manière, pour une entreprise désireuse de recruter à l’étranger, de tester, de former et d’intégrer une nouvelle ressource à son équipe en attendant que celle-ci arrive au pays.

« Le modèle hybride crée une tout autre dynamique et permet d’aller chercher une main-d’œuvre plus qualifiée et […] déjà prête à donner son 100 % à l’entreprise », ajoute Wayne Tessier.

Le télémigrant; un nouvel acteur sur le marché du travail?

Depuis quelque temps, on observe un intérêt croissant pour le travail à l’étranger. Tandis que les plus jeunes y voient souvent une occasion de découvrir le monde, d’autres, dont les compétences éprouvées correspondent davantage à des postes « plus haut placés », cherchent plutôt à vivre une expérience de travail internationale sans pour autant souhaiter quitter leur pays.

« Les dernières statistiques d’Emploi Québec démontrent que d’ici 2026, 22 % de la main-d’œuvre sera issue de l’immigration. Donc la télémigration est un incontournable. Si vous n’avez pas dans votre entreprise […] une personne sur quatre issue de l’immigration, vous accusez un retard par rapport à l’ensemble du marché », dit l’expert.

Quelles mesures un employeur qui souhaite recourir à la télémigration devrait-il prendre?

  1. Procéder à l’analyse des besoins de l’entreprise: Il faut « avoir un plan, non seulement à court terme, mais à moyen et long termes. Pour le travailleur qui décide d’opter pour la télémigration, il s’agit d’un plan de vie. [Il faut donc s’assurer d’] avoir les budgets nécessaires », indique Wayne Tessier.
  2. Faire appel à une entreprise spécialisée dans le domaine: Effectuer du recrutement requiert une expertise, par exemple en ce qui concerne les aspects légaux et fiscaux. Un bon partenaire sera en mesure d’accompagner efficacement l’entreprise qui recrute tout le long du processus.
  3. Mettre en place un plan d’intégration: Veiller à communiquer de manière transparente avec l’équipe locale quant au recrutement de ressources à l’international. Ainsi, elle se sentira concernée, adhérera mieux au projet et percevra celui-ci de façon plus positive.
  4. Être prêt à relever différents défis, tels que le décalage horaire (dont on peut aussi tirer avantage pour faire avancer certains dossiers), les différences culturelles et propres au pays du télémigrant (congés de maternité ou fériés, périodes de vacances, etc.) ou le départ d’un employé. Pour pallier ce dernier problème, certains programmes de recrutement international, comme celui d’AURAY Sourcing, offrent une solution pour remplacer ces ressources.

De la même manière que le télétravail, la télémigration semble là pour durer. « La pénurie de main-d’œuvre devrait encore durer une dizaine d’années. Donc, je ne crois sincèrement pas que la tendance ira en diminuant », conclut Wayne Tessier.

Allez plus loin :
Pénurie de main-d’œuvre au Canada : un problème tenace – Étude du Devoir

Commentaires

Partager sur mon fil d’actualité

Powered by WP LinkPress

Inscrivez-vous à l’infolettre

  • Ce champ n’est utilisé qu’à des fins de validation et devrait rester inchangé.