Rémunérer autrement
La rémunération en entreprise est une question centrale dans un contexte de pénurie de main-d’œuvre. Alors que les gestionnaires de PME jonglent avec des enjeux de recrutement et de rétention, les interrogations se multiplient. Est-ce qu’il faut revoir la façon de rémunérer les gens? Le salaire doit-il être bonifié par des avantages sociaux, une meilleure gestion du rendement? Doit-on envisager des mesures pour la retraite? Quelles sont les autres pistes à explorer afin de se démarquer en tant qu’employeur et satisfaire à la fois l’entreprise et les employé·e·s?
« Nous sommes dans un marché en surchauffe; un marché marqué par une des incertitudes en ce qui concerne l’évolution de l’inflation et la possibilité d’une récession, mentionne Marc Chartrand, CRHA Distinction Fellow, ASC, conseiller principal au sein de la firme PCI rémunération-conseil. Une certitude demeure cependant, au Québec, la pénurie de main-d’œuvre va se poursuivre jusqu’à la fin de la décennie. Principalement pour des raisons démographiques et pour la première fois de l’histoire moderne, nous allons vivre un ralentissement, voire une récession économique, qui aura très peu d’impact sur le taux de chômage.
« Dans ce contexte, les gestionnaires doivent se rappeler ceci : il est moins coûteux de retenir les gens que d’en embaucher de nouveaux. Quand une entreprise a des taux de roulement élevés, on réalise que c’est coûteux de remplacer des gens, c’est un processus long et difficile. On peut structurer des programmes pour faciliter l’embauche, mais il faut aussi penser à des mesures de rétention. Si une organisation se retrouve avec un taux de roulement de 35 %, elle doit adopter des mesures pour diminuer ce taux. Ces mesures vont aussi faciliter l’embauche. Et elles devraient intégrer non seulement la rémunération directe et indirecte, mais aussi l’environnement de travail et le perfectionnement des compétences.
« Il faut faire attention aux demandes d’augmentation de salaire qui risquent d’alimenter les iniquités à l’interne et de créer d’autres sources de frustration ou de problèmes dans les organisations. Dans un contexte où les employé∙e∙s n’hésitent pas à divulguer leurs informations de rémunération, la transparence est autant une opportunité qu’une menace.
« En période d’incertitude économique, la préoccupation première des employé∙e∙s, c’est leur rémunération directe. La première chose à faire est de nous assurer que les salaires offerts sont concurrentiels. Et ensuite, on peut envisager l’ajout voire la bonification des autres avantages comme la télémédecine, les lunchs au bureau, la carte de transport. »
Quels sont les avantages qui, au-delà du salaire, permettent de répondre aux enjeux liés à la rétention et à l’attraction des talents? Voici quelques pistes en lien avec les différentes catégories d’emplois :
Pour les employé∙e∙s de première ligne, des opérations ou du service
- Augmenter les salaires de ceux et celles qui font des quarts de travail qui sont plus exigeants et plus atypiques;
- Considérer l’ajout de trois ou quatre journées de congé mobiles pour dédommager les employé∙e∙s qui ne peuvent bénéficier du télétravail;
- Proposer des gratifications, par exemple des cartes de transport en commun ou des abonnements à Bixi.
Pour les professionnel∙le∙s et les cadres
- Instaurer une progression salariale plus rapide et fondée sur la contribution;
- Prendre le temps de questionner les employé∙e∙s sur ce qui les intéresse et leur proposer des projets qui répondent à leurs aspirations et à leurs besoins de perfectionnement;
- Prôner l’équilibre entre la vie personnelle et la vie professionnelle; les employeurs doivent s’assurer d’être sensibles à cette dimension et d’être cohérents;
- S’assurer d’avoir un programme de retraite intéressant. Un tel programme contribue à attirer des cadres à mi-carrière.
La rémunération, rappelle Marc Chartrand, est un moyen, et il est important d’imaginer comment mobiliser tous les talents d’une organisation en fonction de ses objectifs.