Comment gérer une demande d’accréditation syndicale

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25 octobre 2022

Andréane Giguère pratique le droit de l’emploi et du travail. Elle s’intéresse plus particulièrement aux questions liées à l’embauche, à la cessation d’emploi, aux normes du travail, à la santé et à la sécurité du travail, aux droits et libertés de la personne, ainsi qu’à l’interprétation et à l’application de contrats d’emploi et de conventions collectives de travail.

Lorsqu’une requête en syndicalisation est déposée par un syndicat pour représenter un groupe désigné de personnes dans un milieu non syndiqué, l’employeur fait face à une série d’obligations et de délais à respecter et est soumis à une marche à suivre que les gestionnaires doivent connaître.

Pour comprendre quels sont les droits et les obligations des employeurs dans le contexte du dépôt d’une demande d’accréditation syndicale, nous avons rencontré Me Andréane Giguère, avocate senior chez Norton Rose Fulbright.

Les syndicats, des partenaires d’affaires des employeurs québécois

« Les syndicats sont de très importants partenaires d’affaires, rappelle Me Giguère, mais la syndicalisation, ça change totalement la dynamique de travail à laquelle un gestionnaire de PME est habitué. Une demande d’accréditation syndicale dans une entreprise occasionne des changements structuraux. C’est toute la dynamique des relations de travail qui est bousculée.

« Dans le but de négocier et de faire appliquer une convention collective de travail, le syndicat devient l’interlocuteur; il a le monopole de représentation des employés visés. Ça change la dynamique au sein d’une entreprise qui ne connaît pas ça. »

À moins qu’une campagne de syndicalisation ait été menée au sein de l’entreprise à la connaissance des gestionnaires, une PME apprendra qu’elle fait l’objet d’une demande d’accréditation syndicale par le Tribunal administratif du Québec qui lui en transmettra copie. Ce document indique quel syndicat fait la demande, quel est le groupe d’employés et quels sont les établissements de l’employeur visés par la demande.

Accréditation syndicale : droits et obligations de l’employeur

À partir du moment où l’employeur est informé de cette requête, précise Me Giguère, il a l’obligation légale de l’afficher sur les lieux de travail au plus tard le jour ouvrable suivant sa réception, et ce, pendant cinq jours consécutifs. L’employeur doit également dresser la liste des employés qui sont visés par la requête et l’afficher dans les cinq jours ouvrables.

« Dès réception de cette demande, l’entreprise doit se poser des questions stratégiques, car elle doit déterminer, dans les 15 jours de sa réception, si la requête est contestée ou non, si le caractère de l’unité demandée par le syndicat est approprié. Les gestionnaires qui choisissent d’émettre une lettre de désaccord sur l’unité par exemple, doivent bâtir un argumentaire soutenant la position de l’entreprise et identifiant l’unité qu’ils estiment appropriée et le transmettre au Tribunal administratif du travail avec copie au syndicat. »

Selon Me Giguère, les gestionnaires demanderont idéalement les services d’un avocat en droit du travail pour les aider à s’y retrouver dans cette situation.

Peut-on refuser une requête d’accréditation syndicale?

Au Québec, un employeur ne peut pas dire non à la syndicalisation, mais certaines choses devraient être faites pour garantir que le groupe de syndiqués à l’intérieur de l’entreprise correspond à la réalité de l’entreprise, à son industrie et à son historique.

« Les gestionnaires de PME doivent être conscients que l’importance de la requête ne se mesure pas au nombre d’employés visés. Par exemple, une requête en syndicalisation qui vise cinq employés et qui n’est pas contestée peut amener le syndicat à déposer une autre demande pour une unité visant dix autres employés. L’entreprise peut ultimement se retrouver avec plusieurs conventions collectives à négocier et, le cas échéant, cela peut devenir très difficile à gérer. »

Ainsi, les gestionnaires doivent savoir qu’avec la syndicalisation, ils devront négocier une convention collective pour les employés visés et ils pourraient faire face, entre autres choses, à des grèves lors du renouvellement de la convention collective.

« Il faut avoir une idée claire de l’impact qu’un conflit de travail peut avoir sur une entreprise », souligne Andréane Giguère.

Gel des conditions de travail : implications pour les gestionnaires

À partir du moment où une demande d’accréditation syndicale est déposée, le gel des conditions de travail est décrété.

« Le gel des conditions de travail n’empêche pas une entreprise d’exercer ces droits de gérance, mais elle ne peut pas, par exemple, changer les conditions de travail pour inciter un groupe à se syndiquer ou à ne pas se syndiquer. Un processus d’accréditation syndicale, rappelle Me Giguère, cela peut parfois être long et comporter plusieurs risques. »

Attention à la communication

Certains employeurs, par peur de commettre des bévues, vont tout simplement arrêter de communiquer avec leurs employés dès qu’une demande est déposée. Une erreur, selon Me Giguère.

« C’est selon moi très dangereux parce qu’il est important de continuer à parler avec nos employés. En tant qu’employeur, la liberté d’expression nous permet de communiquer avec nos employés, mais, d’un autre côté, la liberté d’association des employés existe et limite ce qu’on peut dire et faire. »

Finalement, Me Giguère recommande aux employeurs d’effectuer un exercice d’introspection et de se questionner devant une demande d’accréditation syndicale. Des enjeux liés aux relations de travail et aux communications internes sont probablement en cause.

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