Modernisation de la loi sur la santé et la sécurité : à quoi s’attendre en 2023?
Afin de donner un aperçu de ce que l’année 2023 réserve aux employeurs, le CPQ, en partenariat avec la CNESST, organisait un webinaire réunissant plusieurs spécialistes : Marie-Claude Perreault, vice-présidente, Travail et affaires juridiques au CPQ, Claire Fournier, avocate au sein du cabinet Morency Avocats, Sylvain Lebel, premier vice-président, solutions mieux-être chez LifeWorks ainsi que Sylvie Richard et Chantal Legault, psychoéducatrices chez RéseauPsy.
Accélérer la mise en place des plans d’action et des programmes de prévention
Comprendre les enjeux psychosociaux, les identifier et les analyser sont les principaux défis qui se dessinent pour 2023, estime Sylvie Richard.
« La pression au travail est un des risques psychosociaux, l’augmentation de la charge de travail aussi et, avec la pénurie de main-d’œuvre, on voit davantage ce phénomène en milieu de travail, il sera donc important d’y porter plus d’attention. »
En 2023, en plus de mettre en place les mesures dites de prévention intérimaire, les plans d’action et les programmes de prévention, les employeurs doivent aussi évaluer leur capacité à réintégrer les travailleuses et les travailleurs et les possibilités d’assignation temporaire au sein de l’organisation.
« Le défi pour les employeurs sera d’être proactifs en matière de réadaptation. C’est beaucoup de travail, mais il y a beaucoup d’outils. La CNESST offre sur son site Internet de l’aide pour élaborer des politiques et pour établir un plan d’action. Les employeurs qui n’ont pas encore commencé ce processus sont déjà en retard », précise Me Claire Fournier.
Prévenir les risques psychosociaux
En 2023, le plus gros défi des employeurs sera d’évaluer leur capacité à déterminer si un risque psychosocial relève de leur responsabilité et s’ils doivent faire de la prévention en amont.
Un défi de taille, selon Me Marie-Claude Perrault; beaucoup d’employeurs ne sont pas encore outillés pour identifier les causes des risques psychosociaux et choisir les moyens à mettre en œuvre.
« Les inspecteurs de la CNESST ne sont pas encore formés pour détecter où intervenir en matière de risques psychosociaux; ils le font dans le cas où ils ont une plainte. Si le milieu n’a pas pris en charge le risque, c’est à ce moment qu’ils vont intervenir. On risque donc d’avoir des interventions des inspecteurs fondées sur une plainte, la constatation des faits au soutien de la plainte, mais sans nécessairement aller au fond des choses, à savoir s’il s’agit d’un risque psychosocial qui relève de la responsabilité de l’employeur et qui devait faire l’objet de mesures de prévention en amont. »
Vers une hausse des réclamations?
En 2023, on s’attend à une forte hausse des réclamations acceptées par la CNESST pour la santé mentale et pour les dossiers dits physiques/mentaux, estime Sylvain Lebel, qui a analysé les données au Canada et ailleurs dans le monde.
« Au Canada, on observe déjà une hausse des réclamations en Colombie-Britannique, en Ontario et en Alberta. La tendance observée, c’est que les lésions traumatiques sont couramment acceptées dans le cas de certaines industries. La notion de stress chronique est de plus en plus acceptée par les différentes commissions. »
Des statistiques révélatrices
La Colombie-Britannique gère environ 54 000 dossiers de santé et sécurité au travail (SST) par année. De 2016 à 2022, le nombre de ces dossiers a connu une augmentation de 75 %.
« Le taux d’acceptation des dossiers était de 54 % en 2016, précise Sylvain Lebel, alors qu’en 2022, c’est 63 % des dossiers qui sont acceptés. Ce sont des augmentations importantes, et on me dit que ça va continuer d’augmenter. »
L’Australie a un régime de SST très similaire à celui du Québec en matière de risques psychosociaux.
« Dans ce pays, la proportion de dossiers incluant les troubles de santé mentale a presque doublé en cinq ans. La cause citée le plus fréquemment dans les demandes d’indemnisation, et c’est important de le souligner, c’est maintenant la pression au travail, suivie du harcèlement ou de l’intimidation au travail et de l’exposition à la violence au travail. Les secteurs les plus touchés sont le réseau de la santé et celui de l’éducation. »
Santé mentale au travail : attention fragile!
Il est important de se rappeler que nous sommes en période post-COVID, souligne Chantal Legault.
« Les gens sont plus fatigués, ils sont plus vulnérables, et la santé mentale est plus fragilisée. Le surcroît de travail en lien avec la pénurie de main-d’œuvre n’aide pas non plus. Les intervenants des services psychosociaux comme les PAE ou les services en pratique privée sont aussi débordés; ils ont de la difficulté à répondre à la demande. »
Devant cette situation, les employeurs peuvent se poser les questions suivantes :
- Comment aider les employés à mieux se sentir au travail?
- Comment instaurer un climat de travail sain et prévenir les risques psychosociaux?