Régime intérimaire SST : bâtir un programme de prévention

La Loi modernisant le régime de santé et de sécurité du travail a été adoptée par l’Assemblée nationale à l’automne 2021, et est toujours en cours d’élaboration. Elle vise à mettre à jour les lois et règlements en matière de prévention et de réparation des lésions professionnelles.

Dans le cadre de cette loi, depuis le 6 avril 2022, tous les établissements qui ne possèdent pas déjà des mécanismes de prévention et de participation dans leur milieu de travail doivent mettre en place le régime intérimaire des mécanismes de prévention et de participation.

Qu’est-ce que le régime intérimaire?

Le régime intérimaire consiste à mettre en place des solutions provisoires concernant les mécanismes de prévention et de participation des travailleurs en établissement pour tous les secteurs économiques.

Il a pour but :

  • de préparer les milieux de travail à la mise en application du programme de prévention ou du plan d’action;
  • d’introduire des mécanismes de participation dans les milieux de travail;
  • d’augmenter la prise en charge de la santé et de la sécurité par les milieux de travail.

Ce régime sera en vigueur jusqu’à ce que les lois et règlements officiels soient adoptés, au plus tard en octobre 2024.

Malgré le fait que de nombreux éléments constitutifs de la loi sont toujours en cours d’élaboration, le législateur souhaite que les employeurs soient proactifs en matière de SST et qu’ils fassent preuve de diligence raisonnable.

Qui doit mettre en place le régime intérimaire?

D’abord, le régime intérimaire concerne les établissements, incluant les entreprises de construction, mais exclut les chantiers de construction, qui auront, dès le 1er janvier 2023, leur propre Règlement sur les mécanismes de prévention.

Ensuite, il s’applique aux établissements qui n’ont toujours pas de comité de santé et de sécurité ni de représentant en santé et sécurité en vertu de la Loi sur la santé et la sécurité du travail. Ceux-ci font sans doute majoritairement partie des groupes prioritaires 4, 5 et 6. Mais les établissements qui font partie des groupes prioritaires 1, 2 et 3 et qui ne répondraient toujours pas aux exigences leur ayant été imposées précédemment doivent le mettre en place.

Le nombre de travailleurs

Les modalités de mise en place du régime intérimaire sont différentes selon que l’établissement compte 19 travailleurs ou moins et 20 travailleurs ou plus.

Pour les entreprises de moins de 20 travailleurs, on désignera un agent de liaison et on mettra en place un plan d’action.

Pour les entreprises de 20 travailleurs et plus, on désignera un représentant santé et sécurité et on mettra en place un programme de prévention.

Si une variation du nombre de travailleurs amène l’entreprise à changer de catégorie, voici ce qui doit arriver.

Si le nombre de travailleurs baisse à moins de 20, le représentant santé et sécurité demeure en place et les modalités du programme de prévention se poursuivent.

S’il grimpe à plus de 20, un représentant santé et sécurité doit être désigné et un programme de prévention doit être instauré.

Désignation et rôle de l’agent de liaison

Dans les établissements de moins de 20 travailleurs, l’agent de liaison est désigné par l’ensemble des travailleurs, qu’ils soient syndiqués ou non.

L’agent de liaison sert de courroie de transmission entre l’employeur et les travailleurs et facilite la communication des renseignements liés à la SST.

Il a aussi pour tâche de porter plainte à la Commission et de collaborer à l’élaboration et à la mise en application du plan de prévention. Il peut également faire des recommandations sur l’identification des risques.

Désignation et rôle d’un représentant santé et sécurité

Dans les établissements de 20 travailleurs et plus, le représentant santé et sécurité est également désigné par l’ensemble des travailleurs, syndiqués ou non. Sa nomination en fait un membre d’office du comité santé et sécurité.

Le rôle du représentant santé et sécurité comporte plusieurs tâches, dont les suivantes :

  • Faire l’inspection des lieux de travail;
  • Identifier les situations qui peuvent être source de danger;
  • Faire des recommandations au comité santé et sécurité, incluant celles concernant les risques psychosociaux liés au travail;
  • Porter plainte à la Commission;
  • Participer à l’identification et à l’analyse des risques.

Dans le cas où personne dans l’organisation ne souhaite exercer ce rôle – ou celui d’agent de liaison, le cas échéant –, l’employeur peut lui-même désigner un représentant parmi les travailleurs, ce qui peut cependant engendrer un problème de motivation. En dernier recours, et temporairement, l’employeur peut exercer son droit de gestion et nommer une personne ne répondant pas à la définition de travailleur.

Formation

Les représentants en santé et sécurité et les agents de liaison ont l’obligation de participer aux programmes de formation prévus par le règlement.

Cependant, comme le règlement n’est toujours pas en vigueur, la durée et le contenu des formations ne sont pas encore déterminés pour le moment.

Comment bâtir un programme de prévention

Voici les étapes à suivre pour élaborer un programme de prévention.

  • Connaître les risques et les prioriser afin de s’attaquer d’abord aux plus importants;
  • Connaître les risques à Tolérance zéro de la CNESST;
  • Mettre en place les procédures;
  • Offrir de la formation aux responsables et aux travailleurs;
  • Faire le suivi des plans d’action;
  • S’assurer de leur application.

Mélanie Barbe, associée déléguée et directrice, Santé, sécurité et environnement chez CIMA+, parle de l’expérience de l’entreprise d’ingénierie.

Chez CIMA+, l’exercice de détermination des risques a été commencé il y a plusieurs années en vue d’obtenir la certification OHSAS 18001 (l’ancêtre d’ISO 45001). Lorsque le temps est venu de répondre aux nouvelles exigences de la Loi modernisant le régime de santé et sécurité au travail et de former de nouveaux comités, la liste existait donc déjà. À titre d’exemple, elle contient notamment les éléments suivants :

  • Espace clos;
  • Travail en hauteur;
  • Excavation et tranchée;
  • Travailler à proximité de systèmes sous tension;
  • Travailler à proximité de ou sur l’eau;
  • Travailler seul ou dans un endroit isolé;
  • Travailler à proximité de voies de circulation;
  • Conduire un véhicule;
  • Voyager à l’étranger;
  • Exposition à des contaminants.

Pour la création des nouveaux comités, CIMA+ a fourni aux établissements qui n’en possédaient pas encore des canevas de termes et références qui leur ont facilité la tâche dans le choix de leurs modalités de fonctionnement. L’utilisation des canevas leur a non seulement permis de personnaliser leur programme de prévention ou leur plan d’action, mais également de renforcer leur sentiment d’appartenance et leur engagement.

« Nous avons aujourd’hui 10 comités à former, des gens qui se sont déplacés, etc. On va donc reformer tout le monde au Québec. On calcule que ça totalise à peu près 2 000 heures de formation », explique Mélanie Barbe.

Mais la nature provisoire des actions actuelles crée de l’appréhension : « C’est naviguer dans l’inconnu. Je pense que la pandémie nous a montré qu’on était capable, mais il reste qu’on se fait questionner », souligne la directrice, en faisant notamment allusion aux réticences – justifiées – de la haute direction face à des initiatives qui pourraient devoir être reprises lorsque les règles officielles entreront en vigueur. « Mais c’est la réalité avec laquelle on doit composer », conclut-elle.

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