L’ergonomie en télétravail,
parlons-en
La fulgurante ascension du télétravail depuis mars 2020 a forcé de nombreuses entreprises à faire face à de nouveaux problèmes. Au milieu du chaos et de l’ampleur de la tâche, les questions de l’ergonomie et de la santé au travail «à la maison» est possiblement passée sous le radar pour plusieurs.
Maintenant que le télétravail s’est taillé une plus grande place dans les entreprises, il est temps de se pencher sur la façon d’aider les travailleurs à la maison, non seulement à s’installer convenablement, mais aussi à privilégier de bonnes habitudes de vie.
Les risques du télétravail sur le plan de l’ergonomie
Contrairement à la perception populaire, l’ergonomie ne se limite pas aux aspects physiques d’un poste ou d’un environnement de travail. Pascaline Eloy, ergonome, ergothérapeute et consultante, explique que « les ergonomes du Québec ont davantage tendance à privilégier une analyse dynamique du travail ». Ils s’intéressent donc davantage au « mouvement » et à l’influence des éléments extérieurs au poste de travail comme tel sur le bien-être des travailleurs. Les risques du télétravail portent donc sur deux aspects.
1- Les risques physiques
Des installations inadéquates
Une chaise droite et dure, un bureau trop haut, un écran trop bas… Même si l’ergonomie ne se limite pas à ces éléments, ceux-ci demeurent fondamentaux. Toute installation qui ne tient pas compte de la position idéale pour travailler à l’ordinateur devrait être revue et corrigée.
La position assise prolongée
À la maison, les travailleurs ont beaucoup moins d’occasions de se lever que lorsqu’ils se trouvaient au bureau. Les déplacements pour parler à un collègue, se rendre dans une salle de réunion ou à la photocopieuse ayant disparu, il est facile d’oublier de bouger.
La sédentarité
En plus d’être collés à leur ordinateur, les télétravailleurs sortent moins de la maison. Plus besoin de sortir pour aller au travail et en revenir, plus de sorties pour aller dîner dehors. Et avec la pandémie et les périodes de couvre-feu, plus beaucoup d’occasions, non plus, de se dégourdir les jambes le soir venu.
Un éclairage déficient
L’éclairage est un élément parfois négligé de l’ergonomie, mais il est essentiel à la santé des yeux. Un éclairage trop faible, trop fort, ou mal positionné peut provoquer de la fatigue oculaire et des maux de tête ou compromettre l’alignement idéal du corps.
2- La charge mentale
Pascaline Eloy insiste : alors qu’on associe souvent le concept d’ergonomie à des troubles musculo-squelettiques, « il y a toute une part de l’ergonomie qui s’adresse à ce qu’on appelle la “charge mentale”. Cette charge mentale, c’est le stress, l’isolement, le manque de communication, se sentir désorganisé ». Elle peut aussi être liée au fait de « rester concentré plusieurs heures parce qu’on est très productif à la maison » ou, au contraire, au fait d’être incapable de le faire en raison d’interruptions constantes. Les facteurs d’augmentation de la charge mentale sont innombrables, surtout en période de télétravail quotidien.
Résultat ? L’augmentation de cette charge mentale se répercute directement sur le corps, où se créent des tensions. « Il y a une corrélation très bien documentée entre les deux », affirme l’ergonome.
Les solutions sont diverses. Plusieurs moyens existent pour obtenir une posture correcte. De nombreuses actions peuvent également être mises en place pour adopter un plan de bien-être au travail intégrant des réponses aux questions du mouvement et de la santé mentale.
LES CONSEILS
Aux gestionnaires
Éduquez vos employés !
Un gestionnaire qui souhaite appuyer ses employés à la maison dans leur recherche d’une meilleure ergonomie doit commencer par les sensibiliser à ces principes de base afin qu’ils développent une certaine autonomie. « Si on veut parler de comment améliorer l’ergonomie, il faut nécessairement augmenter les connaissances du travailleur », déclare Pascaline Eloy. Si celui-ci est incapable de faire des liens entre sa posture de travail, ses habitudes de vie et ses troubles musculo-squelettiques, « il ne pourra pas générer de solutions au fur et à mesure qu’il va rencontrer [des problèmes]. Quand on comprend la posture de base et les facteurs de risque, on peut faire preuve de créativité ».
Aux travailleurs
Faites preuve de créativité
La créativité se trouve au cœur des solutions à apporter. Pour une installation à long terme, Pascaline Eloy recommande tout de même de se procurer une bonne chaise, « la pierre angulaire » de l’ergonomie de bureau. Mais pour dépanner ou tout simplement bien faire les choses à peu de frais, il y a une panoplie de possibilités.
Pour vous installer
- Placez une serviette roulée dans le bas de votre dos afin de soutenir les vertèbres lombaires, si vous utilisez une chaise non ergonomique.
- Bricolez-vous une table de la bonne hauteur à l’aide de chevalets et d’une surface de base.
- Servez-vous d’une pile de livres, solution idéale pour surélever un écran trop bas ou un ordinateur portable qu’on accompagne d’un clavier externe.
- Pensez à acquérir un écran externe (même d’occasion) si vous travaillez en tout temps sur un ordinateur portable.
- Entourez-vous de meubles pratiques et usez de plans inclinés pour faciliter l’accès aux choses dont vous avez besoin rapidement.
Pour bouger
- Éloignez volontairement certains objets ou documents pour vous obliger à vous lever plus souvent.
- Associez certaines activités à la position debout ou exécutez-les en marchant : conversation téléphonique, relecture ou même réunion peuvent être accomplies sans être assis.
Allégez votre charge mentale
Tout ce qui peut contribuer à réduire votre charge mentale est bienvenu.
- Établissez des règles familiales claires pour éviter les interruptions dans la mesure du possible.
- Utilisez un casque antibruit pour vous isoler.
- Parlez de vos difficultés avec vos collègues, vos amis, votre famille… ou avec des professionnels.
- Sortez marcher tous les jours !